Gregor écrivain à Vernouillet
sam. 29 mai
|EDMAVernouillet
Auteur : Bertrand Pascual Mise en Scène : Bertrand Pascual Avec Bertrand Pascual, Juliette Gohet, Michel Rousseau, Philippe Légère, Jean-Yves Mangou, Caroline Destermes, France-Anne Chang, Véronique O'Brien, Pascal Pellerin, Marie-Catherine Mangou. Note Musiciens: Jean-Luc Houbron, Pierre Loncle Rég
Date et lieu
29 mai 2021, 20:20 – 22:25
EDMAVernouillet, 81 Boulevard de l'Europe 78540 Vernouillet, France
À propos
Dans La Métamorphose, de Franz Kafka, Gregor se réveille un matin transformé en insecte. Cela se produit parfois. Et plus souvent qu’on ne croit. Il suffit de se trouver pris dans le champ de croyance d’un autre, enfermé dans ses projections et dans son langage. L’autre, en l’occurrence, c’est le père de Kafka. Il considère son fils comme un parasite, une vermine. Il le lui a dit. Bien entendu, c’est une métaphore, une simple façon de parler, mais il se trouve que son fils n’est pas de ceux que les métaphores indiffèrent et qui n’entendent pas ce que parler veut dire. Son fils est écrivain. Il fréquente les milieux intellectuels de Prague. C’est d’ailleurs pourquoi son père le traite de parasite. « Qui couche avec les chiens attrape des puces », lui a-t-il dit. De telles paroles entendues de la bouche d’un père ont dû s’ancrer profondément dans l’esprit du jeune Franz. Il a fallu qu’il se les répète, les retourne dans sa tête, les laisse s’incruster durablement en lui pour qu’une nuit de 1912 – il a alors 25 ans – il décide d’écrire La Métamorphose, c’est-à-dire de prendre son père au mot, de lui renvoyer, comme dans un miroir, l’image qu’il s’est faite de lui, son fils.
Plus d’un siècle après l’écriture de la nouvelle, j’ai modestement tenté de libérer Gregor de sa carapace animale pour mieux scruter l’écrivain en lui. Gregor écrivain est, si l’on veut, une sorte de portrait de l’écrivain en Gregor. Portrait de Kafka, bien sûr, puisqu’il est Gregor ; mais portrait, également, de l’Ecrivain – avec un grand E –, portrait de tout écrivain.
Qu’on ne s’attende pas cependant à beaucoup de netteté dans le trait : Gregor n’apparaît pas sur scène. Nul ne le voit, ni personnages, ni spectateurs, puisqu’il s’est enfermé dans sa chambre pour écrire. Ce sont les autres, tous les autres – parents, sœur, ami, fiancée, domestique, patron, voisine, médecin – qui parlent de lui et qui parlent pour lui, chacun s’employant à imposer sa vérité aux autres, chacun s’accrochant avec férocité à son Gregor, comme des chiens dévorants se disputent la curée qu’on leur a jetée.
Gregor n’y survit pas. On sait quelle fortune la postérité a réservée à l’écrivain.
Bertrand Pascual
Schedule
1 heureprécision